LDH : Le consentement ne pèse pas lourd à côté des conditions sociales

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La LDH lutte contre les atteintes aux droits des individus, dans tous les domaines de la vie civique, politique et sociale. Historiquement, elle s’est engagée sur la question de la prostitution depuis sa création en 1898[[La LDH et la prostitution au début du 20ème siècle, par Anne-Martine Fabre, Hommes et libertés n° 122, avril/juin 2003.]].

Nicole Savy

membre du Comité central de la Ligue des Droits de l’Homme, responsable du groupe égalité/droits des femmes, défend une position abolitionniste, qu’elle voit comme inséparable des grands choix de la Ligue.

Nous n’avons pas changé de position ni d’ailleurs retravaillé la question depuis l’adoption par le Comité Central d’un texte abolitionniste en septembre 2002. À l’époque, il n’y avait eu aucune opposition sur le fond. Cette position est au plus profond de la culture de la Ligue. C’est un choix lié à son universalisme ; je ne dirai pas à son féminisme, tant le féminisme reste toujours un champ à part qu’il n’est possible d’aborder qu’à condition de se battre. Il y a toujours eu, à la Ligue, un profond refus de la prostitution comme rapport social marchand dans lequel l’un des deux acteurs est infériorisé, la femme le plus souvent.

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Pour nous, la limite se trouve du côté de la liberté individuelle. À la LDH, c’est sacré. Mais nous avons une conscience sociale suffisante pour savoir que le couplet de la liberté de se prostituer n’a pas grand rapport avec la réalité que vivent les femmes. Toutes les invocations du consentement, nous savons qu’elles ne pèsent pas lourd à côté des conditions sociales du réel.

Pour travailler sur la prostitution, deux entrées nous semblent plus pertinentes : les violences et la question des étranger-e-s. Nous soutenons sur le principe le projet de loi-cadre sur les violences du CNDF même si quelques points juridiques font problème. Sur la question des étranger-e-s, nous avons porté devant le CEDAW une note virulente sur la politique française sur la traite, une politique qui accuse les victimes, considérées comme délinquantes, au lieu de les protéger.

Au plan politique, nous ne sommes pas plus partisans de légaliser que d’interdire la prostitution. Pour nous, elle ne doit relever ni d’un droit spécifique ni du non-droit, mais des droits communs à tous. Nous refusons d’en faire un métier. A priori, nous sommes opposés à la pénalisation des clients à cause des risques de clandestinité accrue mais le débat n’a pas été repris depuis longtemps et peut-être les choses ont-elles évolué sur ce point.

Pour le moment, l’opportunité ne s’est pas trouvée. Et puis disons-le, c’est encore un sujet qui gêne les hommes…