Pour lutter contre les trafics d’êtres humains, l’Union européenne doit s’attaquer à la demande

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Le Lobby européen des femmes demande à l’UE de se concentrer sur la demande de prostitution, conformément à la Convention de l’ONU de 1949.

Le 18 Octobre, l’UE célébrera la quatrième Journée européenne contre la traite des êtres humains et lancera une conférence de deux jours sur le sujet. Le Lobby européen des femmes (LEF) s’inquiète de la tendance grandissante dans les réunions européennes et internationales à considérer la traite des êtres humains comme une question homogène, menant à des actions générales qui ne permettent pas de s’attaquer aux causes des différentes formes de traite. 79% de la traite des êtres humains visent l’exploitation sexuelle, et plus de 80% des victimes dans ce cas sont des femmes. Pourquoi l’Europe et ses pays membres refusent-ils de faire face à cette réalité ?, demande Brigitte Triems, Présidente du LEF. Pour s’attaquer concrètement au phénomène de la traite, il faut reconnaître ses différentes facettes et admettre la prévalence de la traite des femmes et des filles à des fins d’exploitation sexuelle. Sinon, les politiques de l’UE et de ses membres sont par essence incomplètes et inefficaces. Le LEF demande à l’UE de se concentrer sur la prévention en s’attaquant à la demande de prostitution, qui alimente la traite des femmes à des fins d’exploitation sexuelle. Si l’UE montre une certaine timidité à travailler sur les causes de la traite à des fins d’exploitation sexuelle, de nombreuses avancées au niveau national montrent qu’il s’agit avant tout d’une question de volonté politique. 18 des 27 Etats membres de l’UE ont ratifié la Convention de l’ONU pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui (1949), qui identifie la tolérance pour les systèmes prostitutionnels comme la cause fondamentale de la traite à des fins d’exploitation sexuelle. La Convention demande la dépénalisation des personnes prostituées et la pénalisation de toutes les formes de proxénétisme et de traite. Depuis lors, trois pays européens sont allés plus loin : la Suède, l’Islande et la Norvège ont rendu illégal l’achat de services sexuels ; plusieurs pays européens ont pénalisé, dans le cadre de la mise en œuvre de la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains (2005), l’achat de services (y compris sexuels) venant de personnes victimes de la traite. En juillet dernier, le gouvernement suédois a publié le rapport d’évaluation de sa loi qui pénalise l’achat de services sexuels, explique Rada Boric, membre du Comité exécutif du LEF. En seulement 10 ans, nous avons des preuves que la loi a constitué une barrière pour la traite et le proxénétisme, qu’elle a eu un effet dissuasif sur les potentiels clients-prostitueurs, et qu’elle a permis de réduire la prostitution de rue sans pour autant la déplacer vers le monde de l’internet. Plus de 70% des Suédois-e-s sont positifs par rapport à cette loi. Qu’avons-nous à perdre en instaurant des mesures législatives similaires partout en Europe ? Cette année, l’UE s’est engagée à développer une stratégie visant à éradiquer toutes les formes de violence masculine envers les femmes. Le Lobby européen des femmes demande que la prostitution et la traite soient reconnues comme des formes de violence envers les femmes, et que des actions concrètes de prévention inspirées de l’approche nordique des droits humains soient inclues dans cette stratégie.

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