Pays Baltes : une campagne contre la traite des femmes

1724

En 2002 et 2003, huit pays du nord de l’Europe sont parvenus, malgré
les divergences idéologiques, à mener une campagne commune contre
la traite des femmes, un programme de prévention et de coopération
internationale coordonné par Gunila Ekberg, conseillère au ministère
de l’Égalité en Suède. Une campagne placée sous le signe de l’égalité hommes/femmes et non sous celui de l’ordre public : Un exemple à suivre…

Pays d’origine de la traite, les pays Baltes sont désormais devenus pays de destination avec leurs clubs de sexe omniprésents. Rien qu’en Estonie, sur trois millions d’habitants, 5000 jeunes femmes sont chaque année victimes de la traite, soit une partie importante de la génération des jeunes filles! 60% des hommes qui achètent des femmes dans ces pays sont des Finlandais venus en ‹voisins›.

Conscient du fait qu’aucune lutte n’est pensable sans collaboration entre pays, le Conseil nordique des ministres, organisation qui comprend tous les pays de la Scandinavie – Islande, Danemark, Norvège, Suède, Finlande ainsi que les régions connectées avec les pays scandinaves (Groenland, îles Fairwayet et Norrland) – a organisé et financé cette campagne à hauteur de 2 millions de couronnes danoises.

Recevez nos derniers articles par e-mail !
Lettres d'information
Recevez nos derniers articles par e-mail !
S'abonner

L’idée est d’autant plus originale que les gouvernements eux-mêmes se sont engagés ensemble et ce, quelles que soient leurs
idéologies!

Le protocole de l’ONU comme base commune de travail

Ces huit pays ont en effet des politiques sur la prostitution et la traite très différentes, pour ne pas dire opposées : si la
Norvège, la Suède et la Finlande partagent des conceptions assez semblables, le Danemark défend une politique proche du réglementarisme allemand, de même que les pays Baltes. Quant à l’Islande, elle se croyait à l’abri du problème du fait de sa situation géographique et a dù revoir sa position.

En tant que coordinatrice, Gunila Ekberg, qui tenait à placer cette campagne sous le signe de l’égalité hommes/femmes et non sous celui de l’ordre public et de la répression, a dù trouver une base commune : en l’occurrence le protocole de l’ONU sur la traite des personnes, signé par l’ensemble de ces pays. Axes retenus : la prévention, le soutien aux victimes et la répression des trafiquants et des auteurs.

Grande victoire de Gunila Ekberg, l’action spécifique concernant l’article 9.5 pour décourager la demande des clients ; un sujet sensible dans le contexte des politiques différentes, et pourtant accepté par l’ensemble des acteurs, même s’il ne s’agissait pas pour eux d’aller jusqu’à pénaliser les clients à l’exemple suédois. Trois grandes conférences ont été organisées dans les pays Baltes. D’emblée, l’accent a été mis sur les rencontres avec les médias, souvent enclins à faire de la prostitution une activité « glamour », et des ateliers ont permis de sensibiliser les journalistes, avec l’appui du film Lylia 4 ever.

Une action heureusement relayée par les médecins sensibilisés

Résultat, dépassant toutes les espérances : entre 200 et 500 articles dans chaque pays Balte le temps de la campagne, après le silence opaque qui avait jusque-là régné sur ces questions. Des actions de prévention ont également été menées jusque dans les régions et villages afin d’aider les femmes à décrypter les propositions d’emplois à l’étranger.

Selon Gunila Ekberg, les esprits ont beaucoup évolué. Globalement, la conscience des liens indissociables entre traite et prostitution locale a fait son chemin, alors que l’intitulé de la campagne ne portait à l’origine que sur la traite, le mot « prostitution » étant trop explosif au plan politique.
Un autre projet, mis en place à l’automne dernier, concerne la région du Grand Nord: Mourmansk et la région de Barents qui comprend le nord de la Norvège, de la Suède, de la Finlande et de la Russie.